Mon coeur si jeune si fou

Texte : Anja Hilling

Traduction : Henri Christophe

Le théâtre d’Anja Hilling est publié aux éditions Théâtrales, éditeur et agent de l’auteure.

Mise en scène : Valentin Naulin

Assistante à la mise en scène : Marion Solange Malenfant

Interprétation : Katell Daunis, Jérôme Denis, Chloé Giraud, Benoit Martin, Valentin Naulin, Florian Pourias

MON COEUR SI JEUNE SI FOU :

Karin Schleuter essaie de se suicider, mais personne ne semble voir son geste, ni réellement s’en soucier.

Eugen Tender est obsédé par un homme, et a peur de la réaction de sa femme, morte ou partie depuis longtemps déjà.

Kristof Lapun sent venir une crise cardiaque qui risque de l’achever, mais persiste à vouloir accomplir son travail.

Paula Rimar est mutique suite à une agression dans son appartement.

Miroslav Vulic est enfermé dans une relation avec une femme anorexique, entre tendresse et dégout.

Yann-Kasimir Sablmann pense avoir assassiné une femme qu’il ne connaît pas, parce qu’il l’a vu en rêve.

Et dans l’immeuble où ils se croisent, aucun ne se doute de ce que pense et ressent l’autre.

LE PROJET :

Mon coeur si jeune si fou est constitué de dix chapitres, conçus comme des monologues intérieurs que viennent interrompre des dialogues réels. Les six personnages de la pièce deviennent tour à tour narrateur.

C’est une variation sur la solitude de l’être humain, et sur les tentatives pour y échapper. Il s’agit de la confrontation de plusieurs intimités, qui ne peuvent pas se rencontrer réellement. Les personnages se croisent, se parlent, essaient malgré tout de partager quelque chose, comme pour combattre un vide existentiel. Ils vivent avec un drame qui leur est personnel, mais ce drame n’est pas perçu par les autres, ou déformé. Ils sont en permanence dans l’incompréhension de l’autre, de ses sentiments ou de ses actes. Les pensées se bousculent, se juxtaposent et se contredisent régulièrement. A mesure que la pièce avance, il devient très difficile de démêler parole intérieure et réalité. En résulte une certaine forme de chaos, d’où transpire les émotions.

Il est question d’intimité et de la façon dont cette intimité interagit avec le monde. De la confrontation du flux intérieur des personnages avec les paroles échangées dans la réalité.

Quel écart y a-t-il entre ces deux réalités qui se rencontrent ?

Si écart il y a, comment se définir face aux autres ?

Sommes-nous ce que nous pensons être, ou ce que les autres pensent que nous sommes ?

Si nous sommes incapables de savoir ce que ressentent les autres, toute tentative de communication est-elle vouée à l’échec ?

Dans la pièce, il semble que le seul moyen d’échapper à cette solitude soit de l’assumer, la dire pour en partager le fardeau. La parole comme un acte nécessaire.

L’humour n’est cependant pas absent de ce tableau. C’est là tout l’intérêt du texte : il concentre à la fois la joie et le drame. Ces deux aspects se chevauchent et se mélangent constamment, dans les croisements des personnages et leurs interactions. C’est cette confusion qui est mise en avant dans le jeu et la mise en scène.

Il s’agit de créer, avec la même équipe, deux versions à la fois différentes et complémentaires de ce texte. Dans un premier temps, se focaliser sur les notions de solitude et d’intimité par le biais d’une série de vidéos ; par la suite, la rencontre concrète des interprètes et du public dans la version plateau est comme une réponse à ce constat d’enfermement.